La Cour de cassation, par son ordonnance n° 1242 du 17 janvier 2022, s’est prononcée sur la limitation à un service donné du nombre de salariés à licencier dans le cadre d’une procédure collective, en précisant les critères pour que cette limite soit retenue valable.
Faits
On trouve à l’origine de cette décision une procédure de licenciement collectif entamée par une société pour des raisons structurelles suite à une révision des stratégies de l’entreprise destinée au maintien de la compétitivité sur le marché. Même si la déclaration de début de la procédure faisait exclusivement référence aux exigences de restructuration de l’ensemble de l’entreprise, la société limitait l’application des critères de choix aux salariés de certains sites.
Un salarié attaquait le licenciement devant les tribunaux de Naples. Les juges, en première et en deuxième instance, annulaient le licenciement pour violation des critères de choix, et condamnaient l’employeur à réintégrer le salarié et à lui verser les rémunérations dues au prorata, dans la limite de 12 mois de salaires, en application de l’article 18, alinéa 4, du Statuto dei Lavoratori.
La Société se pourvoyait alors en cassation en contestant d’une part, la violation des articles 4 et 5 de la Loi 223/1991 quant au fait qu’avait été déclarée non valable la limitation du nombre de personnes à licencier à certaines unités ou certains services et, d’autre part, la violation de l’article 18 du Statuto dei Lavoratori pour avoir été condamnée à la réintégration du salarié.
La décision de la Cour de Cassation
La Cour, argumentant de façon approfondie, rejette le pourvoi en précisant que la limitation des salariés à licencier, pour pouvoir être valable, suppose que l’employeur, dans la communication faite en application de l’article 4, alinéa 3, de la loi n° 223/1991, indique aussi bien les raisons pour lesquelles les licenciements sont circonscrits aux salariés d’une certaine unité ou d’un secteur donné, que les raisons pour lesquelles il n’estime pas opportun de muter les salariés vers d’autres unités de production plutôt que de recourir au licenciement.
La règle générale, selon laquelle les salariés à licencier doivent être identifiés dans l’ensemble de l’entreprise n’empêche pas en soi de limiter le nombre de personnes concernées au personnel d’un certain secteur ou service. À cette fin, la Cour précise qu’il est cependant nécessaire que (i) les exigences techniques et de production soient précisément indiquées dans la déclaration de début de la procédure de licenciement collectif et que (ii) l’employeur démontre les raisons qui justifient son choix d’intervenir dans un domaine plus restreint.
La précision dans la déclaration exigée par l’article 4 est destinée à faire en sorte que (i) les organisations syndicales soient en mesure de vérifier qu’il existe un lien de causalité entre les raisons qui déterminent la nécessité de licencier et le les salariés licenciés et (ii) la délimitation du nombre des salariés visés par la procédure de licenciement, soit le fruit d’exigences organisationnelles effectives à la base de la réduction du personnel, dûment indiquées dans la déclaration et par rapport auxquelles il doit y avoir une correspondance parfaite.
La Cour de cassation a de plus précisé que dans le choix des personnes à impliquer dans un licenciement collectif – pour exclure la comparaison avec les salariés ayant des compétences équivalentes, travaillant dans des unités de production non fermées et réparties sur le territoire national – le fait que pour conserver l’emploi d’un salarié du site fermé, il conviendrait de le muter sur un autre site, avec l’augmentation des frais en découlant pour l’entreprise est sans incidence.
À cet égard, la Cour relève que l’article 5 de la Loi 223/1991, qui dicte les paramètres d’identification des salariés à licencier, ne fait pas référence à la survenance de frais supplémentaires ni à la répartition des sites sur le territoire.
Enfin, eu égard aux conséquences de la nullité déclarée du licenciement, la Haute Cour, rappelant sa jurisprudence, a répété qu’en l’espèce, il n’y a pas une simple violation de forme de la procédure relative à la déclaration incomplète prévue par la loi. Selon la Cour, en l’espèce, il y a eu une violation de fond, liée à l’application de critères de choix à un nombre de personnes à licencier délimitée de manière abusive dans l’ensemble de l’entreprise, avec application en conséquence de la protection prévue par l’article 18, alinéa 4, du Statuto dei Lavoratori.
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