La Cour de cassation, par son arrêt du 6 mai 2021, n° 12040, a déclaré qu’il est légitime, dans le cadre d’une procédure de licenciement collectif, de limiter le périmètre d’intervention aux unités productives objet de la réorganisation, au lieu de toucher l’ensemble du personnel de l’entreprise.
Les faits
Une société avait ouvert, en décembre 2016, une procédure de licenciement collectif, en limitant le projet de redimensionnement à seulement deux unités de production et, par conséquent, sans toucher, dans l’application des critères de choix des travailleurs à licencier, l’ensemble du personnel de l’entreprise.
Dans la communication d’ouverture de la procédure, on expliquait que ce choix était justifié, tout d’abord, par la distance géographique de ces unités de production par rapport aux autres sites de l’entreprise. Ceci rendait anti-économique, sur la base de ses exigences d’organisation, un éventuel transfert collectif des salariés à la place du licenciement effectué. En second lieu, ce choix était lié au caractère non fongible des fonctions des salariés préposés aux deux unités concernées, par rapport aux travailleurs employés dans d’autres sièges.
Quelques-uns des travailleurs licenciés ont saisi l’autorité judiciaire afin d’étendre le nombre des travailleurs touchés par le licenciement à l’ensemble du personnel de l’entreprise. Suite à l’arrêt de la Cour d’Appel territorialement compétente – qui avait déclaré la conformité de la communication d’ouverture de la procédure aux conditions requises par l’art. 4, troisième alinéa, de la Loi n° 223/1991 – les travailleurs se sont pourvus en Cassation.
La décision de la Cour de Cassation
La Cour de Cassation, partageant les arguments des juges du fond, a tout d’abord confirmé que (i) la cessation de l’activité est un choix du chef d’entreprise et constitue un exercice inaliénable de la liberté d’entreprise garantie par l’article 41 de la Constitution et que (iii) la procédure de licenciement collectif a pour seule fonction de permettre le contrôle par les syndicats sur l’efficacité de ce choix. Et le contrôle judiciaire ne porte pas sur les motifs de la réduction du personnel mais seulement sur le caractère correct de la procédure.
Ceci étant précisé, la Cour de Cassation affronte la question centrale de l’affaire, pour arriver à une conclusion conforme à son orientation consolidée, selon laquelle la délimitation est légitime quand le projet de restructuration se réfère exclusivement à une ou plusieurs unités de production, à la condition que les raisons technico-productives et d’organisation de la limitation soient énoncées de façon adéquate dans la communication d’ouverture de la procédure, également sur la base du caractère fongible ou non des fonctions exercées par les travailleurs des sièges concernés, et qu’elles soient cohérentes avec les raisons indiquées comme fondement de la réduction du personnel. En l’espèce, selon la Cour, le caractère non fongible des fonctions réside dans la particularité de chaque site de production, en raison des marchés qui y sont traités, laquelle aurait rendu impraticable, à divers niveaux, le transfert d’un siège à l’autre.
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Par cet arrêt, la Cour de Cassation admet, en substance, le recours aux exigences techniques, d’organisation et de production comme unique critère de choix aux fins de la détermination du personnel à licencier dans le cadre d’une procédure de licenciement collectif. Il reste convenu que ces exigences doivent être illustrées dans la lettre d’ouverture de la procédure et être cohérentes avec les motivations posées comme fondement à la réduction du personnel.
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