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Lancement d’alerte : un guide complet pour les entreprises et les employeurs

Catégories: DLP Insights, Publications, News, Publications | Tag: GDPR, protezione dei dati personali, Whistleblowing

12 Nov 2024

Le lancement d’alerte est l’expression utilisée lorsqu’une personne signale un comportement répréhensible qui a été porté à son attention sur le lieu de travail. La personne qui émet le signalement est appelée le lanceur d’alerte.

Le thème de la protection des lanceurs d’alerte est né aux États-Unis et est devenu très important lorsque la Loi américaine Sarbanes-Oxley a été adoptée en 2002. Cette législation a introduit l’obligation pour les sociétés cotées en bourse de mettre en place des mécanismes appropriés pour assurer la protection contre d’éventuels actes de représailles à l’encontre des employés qui signalent un comportement répréhensible sur le lieu de travail.

Sur le plan international, l’article 33 de la « Convention des Nations Unies contre la corruption » du 31 octobre 2003 dispose que « chaque État Partie envisage d’incorporer dans son système juridique des mesures appropriées pour protéger contre un traitement injustifié toute personne qui de bonne foi et sur la base de soupçons raisonnables, signale aux autorités compétentes tout fait concernant une infraction établie conformément à la présente Convention ».

Une fois que le phénomène a pris racine aux États-Unis, il a lentement commencé à se propager en Europe, en particulier au Royaume-Uni.

En Italie, la législation sur le lancement d’alerte est restée sectorielle pendant longtemps.

La première étape vers l’adoption d’un règlement a été prise avec la dénommée « Loi Severino » (Loi italienne 190/2012), qui a introduit l’article 54 bis du décret législatif italien 165/2001, T.U.P.I. (« Texte consolidé sur l’emploi public» ; « Testo consolidato sul Pubblico Impiego »), dans le cadre des instruments de lutte contre la corruption dans le secteur public.

Un premier régime organique en la matière a été instauré par la Loi italienne n° 179 du 30 novembre 2017, qui a introduit, pour la première fois, également dans le secteur privé une protection spécifique pour les lanceurs d’alerte, en modifiant l’article 6 du décret législatif italien n° 231/2001 sur la responsabilité administrative des sociétés et des sociétés en cas d’infraction, en ajoutant les alinéas 2 bis, 2 ter et 2 quater à l’article susmentionné.

À partir de 2017 et jusqu’à l’adoption de nouvelles dispositions au niveau de l’UE et au niveau national, les destinataires de la législation sur le lancement d’alerte étaient les suivants :

  • Organisations privées (sociétés, groupes de sociétés, organisations non gouvernementales – ONG, fondations, associations, etc.) AVEC LE MODÈLE ORGANISATIONNEL 231 et
  • Administrations publiques.

La législation italienne sur le lancement d’alerte

Après une longue attente et plusieurs reports, le 25 mars 2023, le décret législatif italien n° 24 du 10 mars 2023 (le « Décret ») a été publié au Journal officiel n° 63 du 15 mars 2023. À travers celui-ci, le législateur italien a transposé la directive (UE) 2019/1937 « sur la protection des personnes qui signalent des violations du droit de l’Union et fixant des dispositions relatives à la protection des personnes qui signalent des violations des lois nationales » (également connue sous le nom de « Directive sur les lanceurs d’alerte ». Ci-après dénommée la « Directive »). 

L’objectif de la Directive était d’harmoniser les législations nationales individuelles en introduisant des normes minimales communes pour protéger et sauvegarder les personnes qui, au sein des sociétés tant publiques que privées, souhaitent signaler des actes répréhensibles de nature diverse dont elles ont eu connaissance dans le cadre de leur travail.

Les nouvelles dispositions sont applicables aux entités du secteur privé qui, au cours de l’année précédente :

  1. ont employé en moyenne au moins 50 salariés sous contrat permanent ou à durée déterminée,
  2. ont adopté des modèles d’organisation et de gestion conformément au décret législatif italien n° 231/2001 («MOG») – même si elles employaient moins de 50 employés – ou
  3. opèrent dans des secteurs réglementés européens (marchés financiers ou secteur du crédit, par exemple).

Champ d’application objectif

Le Décret italien réglemente la protection des personnes qui signalent des violations du droit national ou du droit de l’Union européenne qui portent atteinte à l’intérêt public ou à l’intégrité de l’administration publique ou d’une entité privée et qui ont été portées à leur attention dans le cadre de leur travail et dans les domaines spécifiés dans le Décret italien et la Directive.

Toutefois, ne sont pas couverts par la nouvelle législation :

  • les litiges, réclamations ou demandes relatifs à un intérêt personnel de l’auteur du signalement ou de la personne qui se plaint auprès des autorités judiciaires ou comptables et portant exclusivement sur son travail individuel ou sa relation de travail public ou sa relation de travail ou son emploi public avec des personnes hiérarchiquement supérieures ;
  • les signalements d’infractions, lorsqu’ils sont déjà couverts par la législation d’ordre public de l’Union européenne ou nationale ;
  • les signalements relatifs aux atteintes à la sécurité nationale, ainsi qu’aux marchés publics assortis d’éléments liés à défense ou à la sécurité nationale, sauf si ces éléments sont couverts par le droit dérivé de l’UE pertinent.

Cela ne préjuge pas de l’application des règles nationales ou de l’Union européenne relatives :

  • aux informations classifiées,
  • à la confidentialité médico-légale et médicale,
  • au secret des délibérations judiciaires.

Champ d’application subjectif

Les sociétés du secteur privé visées par les nouvelles dispositions doivent veiller à ce que, outre leurs employés et travailleurs actuels, les dispositions du Décret italien s’appliquent également aux apprentis, travailleurs indépendants, travailleurs autonomes et consultants, bénévoles et stagiaires (y compris ceux non rémunérés), actionnaires, personnes exerçant des fonctions d’administration, de direction, de contrôle, de supervision ou de représentation (même si ces fonctions sont exercées de facto) ainsi qu’à toutes les personnes travaillant sous la supervision et la direction des contractants, sous-traitants et des fournisseurs.

La protection doit être garantie même lorsque la relation de travail n’a pas encore été établie – si l’information a été obtenue au cours du processus de sélection ou, en tout état de cause, au stade précontractuel – pendant la période d’essai ou après la cessation de la relation, si l’information sur d’éventuelles violations a été obtenue au cours de la relation.

Enfin, les mesures de protection des lanceurs d’alerte s’adressent également aux dits « facilitateurs » (ceux qui assistent le travailleur dans le processus de signalement), ainsi qu’aux personnes travaillant dans le même contexte professionnel que les lanceurs d’alerte et qui leur sont liées par une relation affective ou familiale stable jusqu’au quatrième degré, aux collègues de travail du lanceur d’alerte qui se trouvent dans le même contexte professionnel et qui entretiennent une relation régulière, aux entités patrimoniales ou qui opèrent dans le même contexte que ces personnes.

Le canal de signalement interne

Après consultation des syndicats, les sociétés du secteur privé doivent établir des canaux internes de signalement qui garantissent une confidentialité maximale, concernant notamment :

  • l’identité de l’auteur du signalement, 
  • la personne impliquée et mentionnée dans le signalement, et
  • le contenu du signalement et de la documentation connexe.

Les signalements internes peuvent être écrits, oraux (par le biais de lignes téléphoniques ou de messages vocaux) ou, sur demande, peuvent être émis lors d’une réunion en face à face.

Les personnes en charge de la gestion du canal de signalement interne doivent :

1. Envoyer un avis de réception à l’auteur du signalement dans les (7) jours suivant la réception du signalement.

2. Mener une enquête approfondie sur le signalement.

3. Émettre des commentaires auprès de l’auteur du signalement dans les (3) mois suivant l’accusé de réception.

En tout état de cause, il est entendu que l’auteur du signalement doit recevoir des informations claires sur le canal, y compris en ce qui concerne les procédures et les exigences pour la préparation des signalements, y compris par la création d’une section dédiée sur son site web.

Le canal de signalement externe et la divulgation publique

La mise en place et la gestion du canal de signalement externe sont confiées à l’Autorité nationale de lutte contre la corruption (« ANAC »), qui a également adopté des lignes directrices spécifiques en la matière dans sa Résolution n° 311 du 12 juillet 2023.

Un canal de signalement externe sera fourni si (i) l’environnement de travail de l’auteur du signalement n’est pas tenu d’activer un canal interne, ou si le canal n’est pas actif ou, s’il est actif, mais non-conforme, (ii) l’auteur du signalement a déjà réalisé un signalement à travers un canal interne mais qu’il n’y a pas été donné suite, (iii) l’auteur du signalement a des motifs raisonnables de croire que le signalement à travers le canal interne ne sera pas efficace ou pourrait entraîner un risque de représailles, ou (iv) il existe un risque imminent ou manifeste d’atteinte à l’intérêt public.

La possibilité de divulgation publique par les médias écrits ou électroniques ou par d’autres moyens de diffusion susceptibles de toucher un grand nombre de personnes est reconnue comme une mesure résiduelle.

Protection des données à caractère personnel des lanceurs
d’alerte

Dans le cadre de la gestion d’un signalement, tout traitement de données à caractère personnel doit être effectué conformément aux règles de protection des données désormais prévues par le règlement (UE) 2016/679 (« RGPD ») et le décret législatif italien n° 196/2003, tel que modifié par le décret législatif italien n° 101/2018 (le « Code de confidentialité »).

Les entités publiques et privées qui gèrent les canaux de signalement sont classées par la législation en tant que « responsables du traitement » et doivent :

désigner comme « sous-traitants de données » tous les prestataires externes qui traitent des données à caractère personnel en leur nom.

  1. concevoir chaque opération conformément aux principes de protection des données à caractère personnel,
  2. effectuer une analyse d’impact sur la protection des données (AIPD),
  3. former et autoriser les travailleurs désignés pour gérer le canal de notification du traitement,
  4. désigner comme « sous-traitants de données » tous les prestataires externes qui traitent des données à caractère personnel en leur nom.

Mesures de protection

La nouvelle législation prévoit une série de mesures de protection en faveur du lanceur d’alerte, comportant l’obligation de préserver la confidentialité du lanceur d’alerte (confidentialité qui doit toutefois également être garantie à la personne impliquée / visée par le signalement), l’interdiction de représailles et (iii) des mesures de soutien en faveur du lanceur d’alerte.

Le Décret italien, qui interdit expressément toute forme de représailles contre les lanceurs d’alerte, fournit une liste indicative mais non exhaustive de cas de représailles, notamment :

  • le licenciement,
  • la suspension, y compris de nature disciplinaire, ou des mesures similaires,
  • la non-promotion ou le déclassement,
  • la modification des tâches/activités assignées,
  • le transfert,
  • la modification des heures de travail,
  • l’ostracisme et le harcèlement,
  • la discrimination et le traitement défavorable,
  • le non-renouvellement ou la résiliation anticipée d’un contrat à durée déterminée.

Il incombe à la personne qui a commis les actes interdits de prouver qu’ils ne sont pas liés au signalement établi et que le préjudice subi résulte du signalement, de la publication ou de la dénonciation. Ce renversement de la charge de la preuve ne s’applique pas aux personnes visées par les dispositions de l’article 3 (alinéa 5) du Décret italien (c’est-à-dire les «facilitateurs», les personnes qui travaillent dans le même contexte professionnel que le lanceur d’alerte et qui sont liées à lui par une relation affective ou familiale stable, les collègues du lanceur d’alerte qui travaillent dans le même contexte professionnel et entretiennent une relation habituelle et courante, ou les entités patrimoniales et opérant dans le même contexte que ces personnes).

Sanctions en cas de violation des règles de lancement
d’alerte

En cas de violation des nouvelles règles en matière de lancement d’alerte, l’« ANAC » impose des sanctions administratives allant de 10 000 à 50 000 euros.

Des sanctions sont prévues si :

  • des représailles ont eu lieu, il a été établi que la dénonciation a été entravée (ou une tentative a été faite pour l’entraver) ou que l’obligation de confidentialité a été violée,
  • les voies et procédures internes de présentation et de traitement des signalements n’ont pas été établies ou les procédures adoptées ne sont pas conformes.

Des sanctions comprises entre 500 et 2 500 euros sont également prévues dans les cas où l’auteur du signalement est reconnu pénalement responsable d’infractions de diffamation ou de calomnie.

Les sociétés qui ont adopté un « MOG » doivent prévoir des sanctions à l’encontre des responsables d’infractions sanctionnées dans le cadre du système disciplinaire du modèle.

Jurisprudence et approfondissements

Lancement d’alerte, les PME ont besoin d’un expert (ItaliaOggi7, 19 février 2024 – Vittorio De Luca) – De Luca & Partners (delucapartners.it)

Le « Whistleblowing » (lancement d’alertes ): entre nouveautés réglementaires et nouvelles obligations pour les employeurs. Par où commencer ? (AIDP, 05 septembre 2023 – Stefania Raviele, Martina De Angeli) – De Luca & Partners (delucapartners.it)

Loi de conversion du « Décret Rilancio » : nouveautés pour le télétravail au temps du Covid-19 (Guida al Lavoro de Il Sole 24 Ore, 31 juillet 2020 – Vittorio De Luca, Antonella Iacobellis) – De Luca & Partners (delucapartners.it)


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