Le 23 septembre dernier, le décret-loi n° 144/2022 (dit décret « Aiuti-ter ») a été publié au Journal Officiel. Il introduit d’importantes nouveautés en faveur des travailleurs, d’un côté en prévoyant de nouvelles indemnités différentes pour les salariés, les travailleurs indépendants et les autres catégories de personnes, en complément des dispositions du décret « Aiuti » (décret-loi n° 50/2022) et, d’un autre côté en apportant certaines corrections aux règles introduites par la loi de finances 2022 en matière de cessation des activités productives de grandes entreprises.
Parmi les nombreuses nouveautés importantes introduites par le décret « Aiuti-ter » la plus significative et notable, dans le cadre des relations de travail, est celle en matière de délocalisations.
Avec la loi de finances 2022 (loi n° 234 de décembre 2021), une nouvelle procédure complexe avait été introduite dans notre système juridique, destinée aux entreprises ayant au moins 250 travailleurs, ayant pour objectif déclaré de garantir la sauvegarde de l’emploi et du tissu productif. Notamment, dans l’hypothèse de clôture ou de réduction de l’activité, les employeurs concernés ont l’obligation d’ouvrir une procédure de consultation et de présenter et discuter avec les représentations syndicales, les régions concernées, le Ministère du Travail, le Ministère du Développement Économique et l’ANPAL, un plan visant à limiter les répercussions en matière d’emploi et au niveau économique.
À présent, avec l’entrée en vigueur du décret « Aiuti-ter », le gouvernement a apporté certaines corrections – toutes de nature évidemment restrictive – à la procédure introduite par la loi de finances et il a introduit une disposition spécifique qui prévoit la restitution de subventions, contributions, subsides et aides financières ou avantages économiques à la charge des finances publiques dont ont bénéficié les établissements de production objet des cessations ou des réductions d’activité.
Procédons dans l’ordre et examinons les nouveautés introduites par le décret en objet.
En premier lieu, les délais prescrits par la procédure, à présent clairement déclarée « en matière de délocalisation » ont été prolongés.
Plus précisément, on a doublé (en la portant de quatre-vingt-dix à cent quatre-vingt jours) la période successive à la communication d’ouverture de la procédure consultative, pendant laquelle les éventuels licenciements qui seraient infligés par l’employeur doivent être considérés comme fondamentalement nuls.
En outre, on a multiplié par quatre (en la portant de trente à cent-vingt jours) la durée de la période pendant laquelle l’employeur et les organisations syndicales, avec les régions, les Ministères du Travail et du Développement Économique, ainsi que l’ANPAL doivent discuter le plan susmentionné.
Ensuite, on a éliminé la prévision contenue dans la formulation originaire de la loi selon laquelle, en cas d’ouverture de la procédure de licenciement collectif suite à l’absence de signature du plan, la durée ordinaire de la consultation obligatoire aurait été réduite de 75 à 30 jours. Avec le décret « Aiuti-ter », l’éventuelle procédure de licenciement collectif visée à la loi n° 223/91 doit être entièrement suivie.
Encore, la sanction pour la majoration du « ticket » de licenciement, au cas où le plan ne serait pas signé par les organisations syndicales, a été augmentée de 500%.
Enfin, comme nous l’avons dit, on a introduit l’obligation de restitution des subventions à la charge des finances publiques dont les établissements de production objet d’une cessation ou d’une réduction d’activité ont bénéficié, perçues au cours des dix années précédentes, proportionnellement au pourcentage de réduction du personnel. Cette disposition s’applique au cas où la réduction de personnel serait supérieure à 40% de celui employé en moyenne au cours de la dernière année, au niveau national ou local ou bien dans la division objet de délocalisation ou de fermeture.
La Cour de cassation, par l’ordonnance n° 118 du 7 janvier 2020 en matière de licenciement collectif, a précisé, en rappelant sa propre orientation consolidée, que le choix des travailleurs à licencier ne peut pas retomber exclusivement sur le personnel affecté au département ou au secteur supprimé ou réduit. En effet, le choix des bénéficiaires du projet de restructuration doit être fondé sur des besoins entrepreneuriaux objectifs. Et la charge de la preuve de l’existence de ces raisons incombe à l’employeur.
Faits en l’espèce
Aussi bien le juge des référés que la Cour d’appel avaient déclaré illégitime le licenciement d’un travailleur dans le cadre d’une procédure de licenciement collectif déclarant la rupture de la relation de travail, et condamné son ancien employeur à verser vingt mois de salaire à titre d’indemnité, en plus du remboursement des frais de justice.
Sur la base de cette décision, la Cour d’appel avait estimé que l’accord syndical signé permettait de considérer que les raisons avancées par la société pour démontrer la suppression du service auquel le travailleur était affecté de manière exclusive existaient bien. Toutefois, cet accord ne pouvait pas être considéré comme suffisant pour remédier à l’obligation de ne pas limiter les possibilités de choix incombant au service supprimé. Selon la Cour de district, la société aurait dû comparer le travailleur avec les travailleurs des autres départements. En effet, ledit travailleur avait démontré qu’il avait un certain nombre de compétences similaires à celles des travailleurs en question (règle du repêchage) et qu’il était physiquement apte à être comparé à eux. Enfin, selon la Cour, l’indemnisation prévue à l’article 18 de la loi 300/1970, ordonnée à la suite de la rupture de la relation, ne nécessitait pas la déduction de l’aliunde perceptum, ni de l’aliunde percipiendum.
Contre la décision de la Cour d’appel, la société déboutée, avec un unique motif, fait appel à la Cour de cassation. Le plaignant résiste et présente un mémoire en défense.
La décision de la Cour de cassation
En raison du motif d’appel présenté, la société a fait valoir que (i) dans une procédure de licenciement collectif, l’obligation de repêchage ne s’applique pas et (ii) dans le cas d’un accord syndical, il n’est pas nécessaire de procéder à une comparaison avec d’autres départements que celui à supprimer.
La Cour de cassation, en citant un précédent, a tout d’abord précisé que « en matière de licenciement collectif pour réduction du personnel, lorsque le projet de restructuration de l’entreprise concerne exclusivement une unité de production ou un secteur spécifique de l’entreprise, le nombre de travailleurs concernés peut être limité aux employés d’un service ou d’un secteur donné, seulement sur la base d’exigences entrepreneuriales objectives, en rapport avec le projet de restructuration de l’entreprise, il incombe à l’employeur de prouver le fait qui détermine la limite objective de ces exigences et de justifier de la manière la plus détaillée possible le choix qui a été fait ; avec pour conséquence que le choix des travailleurs ne peut être considéré comme légitime uniquement au motif qu’ils sont employés dans le service opérationnel supprimé ou réduit, en négligeant des capacités professionnelles équivalentes à celles des employés d’autres organisations ».
En l’espèce, la Cour a estimé que la société avait l’obligation – puisque l’employé avait démontré qu’il possédait de nombreuses compétences professionnelles acquises au cours de la relation de travail – de le comparer aux employés des autres services restés en activité.
Cela dit, la Cour de cassation, rappelant une fois encore un précédent, a observé qu’en matière de licenciements collectifs, l’employeur et les syndicats peuvent signer un accord pour réglementer la mise en disponibilité des travailleurs en sureffectif en établissant des conditions différentes de celles prévues par la loi, à condition que les exigences d’objectivité et de rationalité soient respectées. Ceci, tant que l’accord est conforme à une fonction régulièrement déléguée par la loi.
Toutefois, en l’espèce, selon la Cour de cassation, l’accord conclu entre les parties ne respectait pas ces exigences car, en prévoyant le licenciement du travailleur, l’accord ne tenait pas compte du professionnalisme avéré du travailleur, et des postes qu’il aurait pu occuper.
Compte tenu de tout ce qui précède, la Cour de cassation a rejeté le pourvoi et a condamné la société aux dépens des frais de procédure.